Datas, média, les marottes du marketing digital au DM1to1

Un article signé par @Maudule envoyée spéciale à Biarritz pour les rdv d’affaires Marketing 1To1. Ca va causer marketing les ptits gars, sortez les crayons.

 

La première édition d’un événement, les rendez-vous d’affaires Digital Marketing  One to One,  avait lieu mardi et mercredi derniers sous le soleil de Biarritz. En tant qu’invitée, j’ai eu la chance de passer deux journées instructives, immergée dans des problématiques effectivement très marketing, et entourée du vocabulaire suivant : smart data, marketing temps réel, retargeting… L’occasion de prendre la température du secteur et d’identifier quelques marottes du marketing digital en 2014.

DM2014

Des solutions, des outils, des solutions…

La data était indéniablement la star de ces deux jours.  Tout comme la phrase « envoyer le bon message au bon moment sur le bon device ». Vous ne serez pas étonnés si je vous dis que les deux allaient ensemble : la data était présentée comme LE moyen du moment pour personnaliser et optimiser le parcours client (et donc, par la même occasion, pour faire plus de chiffre).
Forcément, les services / solutions présentés allaient dans ce sens : retargeting, RTB, extension d’audience via un graphe d’interaction ou encore pilotage cross-canal rendu possible par une plateforme intégrant tous les canaux, même ceux du marketing direct… Et les mots d’ordre quant à eux tournaient autour de smart data, marketing temps réel  et DMP.
Mettons-nous à la place d’un annonceur travaillant dans le marketing digital et voulant faire de la conquête et de la fidélisation : cette approche opérationnelle et ROI-ste, basée sur les résultats et la performance, est certes légitime.  Il y a quelque chose de rassurant dans le fait de confier les données dont je dispose à un outil ou une solution qui fonctionnent avec une techno robuste. Et il y a quelque chose de fascinant dans la capacité actuelle des technos à offrir de l’ultra-ciblage et à le faire plus vite que ce que nous pouvions imaginer il y a quelques années.

Néanmoins, est-ce qu’on est pour autant dans le fameux « one to one »? Peut-on véritablement, grâce aux outils et aux solutions, parler d’une relation différente entre le consommateur et la marque ?

Vous reprendrez bien un petit peu de display ?

Le premier problème pour moi, c’est que l’on cherche encore à faire avant tout du push en 2014. De la campagne, et du display, encore et encore. On le fait génialement bien, avec des outils fantastiques, on personnifie l’expérience client et on a énormément de données pour fidéliser ses publics.stone dog cake

Mais on reste dans de la publicité et dans du média ; or Internet – je crois que ce blog ne manque pas de le répéter – ne peut pas être appréhendé comme sous-entendant uniquement ce type de logique. Si vous n’en n’êtes pas convaincu, je vous invite à (re)lire ces articles (celui-ci et celui-là) qui l’expliquent très bien.

Et de la tarte aux Data?

Le deuxième problème se situe dans la fascination qu’exerce la data. Comme si le simple fait de dire « woaouh j’exploite des données » rendait de facto une stratégie digitale mieux pensée et plus intelligente. En cela je rejoins à 100% les propos d’Yseulis Costes de 1000Mercis qui rappelait très justement  : « il faut savoir fabriquer sa propre donnée« .

Data-is-everywhere

On pourrait presque appliquer la citation de Brian Solis sur les réseaux sociaux au domaine de la data : « data is about sociology and psychology more than technology« .
En effet, on aura beau parler de DMP et de technologies pour que ma data devienne tout à coup « smart », cela n’enlèvera pas l’idée que derrière les données, il y a des gensEt derrière les gens, il y a des comportements. Mais pas seulement des comportements de navigation (je suis abonnée à ta newsletter, j’ai cliqué sur un lien, je suis restée 2’47 sur la page et ensuite je suis allée sur une fiche produit, j’ai liké le produit et je suis partie). Il y a aussi des besoins, des attentes, des frustrations. Qu’il faut étudier, analyser et comprendre avant de les injecter dans une segmentation CRM. Bref, pour parodier mochement Jean-Paul S., l’intelligence précède l’utilisation de la data.

Prendre en compte la singularité de chacun

On me rétorquera que les clients des marques sont probablement déjà bien connus par ces dernières.  Soit – précisons quand même que ventiler ses clients par rapport à leur « taux d’engagement » sur la page Facebook de ma marque n’est pas signe de réelle connaissance. D’une part parce que « engagement » est un concept confus, d’autre part parce que baser la connaissance client à un seul et unique lieu de conversation est réducteur, et enfin, parce que l’échelle de Forrester, qu’on était contents de montrer dans des slides en 2008, n’est plus valable aujourd’hui – même dans sa version actualisée.

Alors je pose la question pour les prospects. Comment faire pour établir une relation « one to one » en faisant de la génération de leads avec des méthodes traditionnelles (affiliation, CPL), et/ou en s’appuyant sur la data comme solution miracle ?

Nous sommes tous singuliers

A l’heure où la défiance vis à vis des marques est clairement avérée, le véritable « one to one », en fait, ne peut pas s’obtenir dans le cadre d’une approche média / publicitaire. Le véritable « one to one » n’utilise pas les techniques qui ont été usitées pendant des décennies par le marketing de masse.
Au contraire, il se fait tactique, et préfère considérer des micro-segments de marché qu’il étudie, analyse et dont il prend en compte les besoins (et c’est notamment pour cela qu’on a absolument besoin de la recherche en SHS).

Pour reprendre les mots de Seth Godin dans son très intéressant ouvrage Nous sommes tous singuliers : exit le marketing de masse, « [le publicitaire] est trop occupé à chercher la masse au lieu de servir les besoins des plus petites tribus”. Pour l’Américain, il n’y a plus « le grand public » et les autres, il y a aujourd’hui avant tout « les autres », autant de petites tribus dont je dois très bien connaître les attentes de manière à leur proposer des produits et des services qui leur correspondent. Car une petite tribu + une petite tribu + une autre petite tribu = une longue traîne (relisez vos classiques).

Nous sommes donc ici très loin d’une approche « push », mais avant tout dans un marketing respectueux du consommateur, qui vise davantage à répondre à des besoins et des attentes – en les comprenant a priori – plutôt que de pousser un message de marque, même si ce dernier fait appel à du marketing prédictif.

Evidemment, ce type d’approche est moins vendeuse et moins sexy lors d’un événement dédié au marketing digital, avec de nombreux prestataires venus parler de leurs solutions aux annonceurs, mais il me semblait utile de rappeler qu’en ces temps où outils et performance sont au centre, l’intelligence, notamment celle de l’utilisateur, ne doit pas être laissée sur le côté de la route.