Un bon succès (et ce n’est pas terminé) pour le financement participatif des aventures de Jean Claude. Ce jeu narratif extraordinairement drôle et délicat, dont vous n’ignorez certainement rien car vous êtes un lecteur assidu de cyroul.com.
Nous avions prévu de nous arrêter il y a une semaine, mais on a joué les prolongations et vous pouvez encore pré-commander un Jean-Claude jusqu’à lundi soir 23h59, après, ce sera (définitivement) terminé.
C’est l’occasion pour moi de revenir sur la façon dont ce financement s’est déroulé. Pas toujours fluide, il faut bien le dire.
Lancement sur Ulule et agenda politique
Lancer un projet sur Ulule (la première fois pour moi) a été une vraie aventure. Dans l’équipe, on a eu de la chance d’avoir Cécile pour nous aider à nous poser les bonnes questions. Mais même avec elle, on était pas au bout de nos surprises.
D’abord il faut valider le projet, et donc un calendrier. Quand faut-il lancer le financement participatif ? Quand tout est parfait ? Mais quand est-ce que tout est parfait ? On a tergiversé et même reporté 2 fois (on devait initialement le lancer en février je crois) avant de s’obliger à y aller début juin.
Car le moment parfait n’existe pas. Malgré toutes nos réflexions sur le moment idéal, nous ne nous attendions ainsi pas aux résultats des Européennes ni à la réponse du président Macron qui ont plombé notre campagne, à la fois dans notre propre envie de rigoler mais aussi celle des gens d’acheter le jeu. Nous avons donc du batailler pour garder le moral durant ces moments difficiles (comme la France entière on pourrait dire).
Mais revenons à Jean Claude. Une fois le projet validé, et le projet lancé, nous avons découvert peu à peu plein de choses oubliées plus ou moins volontairement (la commission d’Ulule sur les frais d’envoi, la banque aux conditions pas très claires, le régime de TVA de l’asso, etc.). Des trucs à évidemment trancher, souvent à la serpe. La vie quoi.
Évidemment il a fallu aussi s’atteler à la promotion de la page. Car vous pouvez avoir le meilleur jeu du monde, avec les meilleurs illustrations du monde et le meilleur modèle économique du monde, si personne ne sait que vous existez, vous êtes déjà mort. Alors commence le moment terrible de la communication sur les réseaux, et faire de l’image, du son ou de l’image qui bouge avec du son. Comme par exemple pour expliquer les règles du jeu :
Côté communication, pour ma part, je serai resté sur de la love money : envoyer des petits messages doux et amicaux aux gens qu’on aime (et qui, on l’espère nous aiment et ont de l’argent à dépenser dans Jean Claude). Une méthode lente qui s’essouffle très vite (j’ai du mal à solliciter mes proches plus de deux fois – j’ai envie qu’ils restent proches). Mais heureusement le reste de l’équipe avait décidé également de lancer Jean Claude sur les réseaux associaux. Ainsi virent le jour de comptes instagram, linkedin de Univers Détendu et même des trucs du genre tiktok ou youtube.
Jean Claude sur les réseaux associaux
Seulement, vous le savez peut-être, mais l’époque où il fallait faire du contenu de qualité sur les réseaux pour émerger est bien terminée. Aujourd’hui le contenu des réseaux sociaux doit :
- être visuel (photo ou mieux vidéo)
- acheter de la pub
- être simple (ou même très simple)
- acheter de la pub
- avoir une périodicité et une régularité de métronome
- acheter de la pub
- utiliser les contraintes spécifiques de la plateforme sur laquelle on se trouve (format, périodicité, type de contenus, etc.)
Bref, utiliser les médias associaux aujourd’hui, c’est obéir à des algorithmes et payer les plateformes. Tout ce que je déteste. C’est peut-être pour cela que je ne les utilise plus.
Mais heureusement, dans l’équipe Jean Claude, certains n’ont peur de rien. Et nous avons alors investis du temps et de l’argent (un peu) sur les réseaux tout en créant contenus sur contenus. Le résultat n’a pas forcément été excellent. On peut même dire qu’il a été plutôt naze (proportionnel à nos faibles sommes dépensées).
Sauf que… Nous avions pris la peine d’envoyer une 30aine de prototypes à des « influenceurs », et ça, ça a très bien marché.
Alors il faut savoir (pour les vieux qui me lisent) que les influenceurs d’aujourd’hui ne sont pas les influenceurs d’hier. Les neo-influenceurs sont très organisés. Ils ont des planning de production de contenu, des visuels et vidéo à créer, etc. C’est devenu un travail assez exigeant. Et si certains ne nous ont jamais répondu (et ne nous ont jamais renvoyé le jeu), pour d’autres, ce fut un coup de coeur. Et Jean Claude a eu alors la chance de recevoir de très bonnes critiques. Je ne remercierai jamais assez tous ces gamers qui ont pris tant de plaisir au jeu, ça fait plaisir.
Le bad buzz des bouses
Forcément, quand vous commencez à avoir un peu de popularité sur les réseaux, le hater sort du bois. Dans notre cas, trois petits « influenceurs » qui ont commencé à critiquer les illustrations réalisées par une IA.
Nous avions déjà expliqué dans notre FAQ (que ces abrutis n’ont pas pris la peine de lire) que pour sortir notre prototype, nous n’avions pas 6000 euros à dépenser en illustration. Et que même en ayant 2 illustrateurs dans l’équipe (Cécile et moi), nous n’aurions pas pu passer 6 mois à faire les illustrations avec notre job à côté. Mais nous prévoyions, en ayant les moyens, de faire intervenir des illustrateurs pour les cartes. Sauf que les mecs, utilisant la fameuse technique du bad-buzz pour se faire connaître, se mirent à pourrir les commentaires des posts des autres influenceurs avec « bouh l’IA c’est pas bien« , « l’IA jamais de la vie« , « on voit bien que c’est de l’IA« , etc.
Alors que faire devant tant de mauvaises foi ? Nous aurions pu leur dire que le design de la boite, du titre et du logo avaient été dessinés par Cécile. Leur rappeler que l’on préférait fabriquer le jeu en France ou en Europe plutôt que de le faire fabriquer par des enfants chinois (a priori, ça ne les dérange pas ça), ou encore que nous serions ravi de payer des illustrateurs pour faire le jeu si nous en avions les moyens… Mais ça n’aurait servi à rien, leur but était de créer une polémique.
Alors, comme on dit dans le métier : « don’t feed the troll » et nous avons laissé cette polémique s’éteindre d’elle-même. Ce qu’elle fit rapidement.
Ceci dit, je relancerai bien cette polémique. Car effectivement, l’IA arrive déjà chez les éditeurs de jeux (de plateau ou jeux de rôle), que ce soit comme soutien/inspiration des illustrateurs ou carrément leur remplacement. Et si ça dérange les puristes, ça n’a pas trop l’air de déranger les gros éditeurs (tant que ça ne dérange pas les consommateurs). Cela signifie quelques grands changements dans le futur des jeux. Pour le meilleur ou pour le pire.
L’autre aspect de la polémique a concerné la ressemblance de Jean Claude avec Run Die Repeat. Et effectivement, lors d’un playtest avec Hymnea, celui-ci m’avait fait remarqué la proximité entre les deux jeux.
Mais si dans Run Die Repeat le maitre de jeu improvise les situations (il doit donc être assez bon), dans Jean Claude, elles sont imposées par des cartes (le MJ peut être nul). Par ailleurs les autres joueurs peuvent « backer » une idée et il y a des cartes équipements. Ce qui en fait un jeu assez différent tout de même.
J’en profite pour vous conseiller d’aller faire un tour dans la boutique d’Hymnea qui débordent (de Missel) de jeux excellents.
A bientôt et merci pour le poisson !
Bon, revenons au sujet Jean Claude.
Dans 3 jours la campagne sera définitivement terminée. A partir de ce moment là, l’équipe va avoir plusieurs choses à faire :
- Clôturer le projet, récupérer les sous, et voir de combien on dispose avec les commandes gens, la commission Ulule, les frais d’envoi, les impôts, et autres petits à côté qu’on n’a certainement pas anticipé. L’argent récupéré en plus va servir pour les différents cadeaux faits aux financeurs mais servira aussi peut-être à améliorer la boite (on rêve d’une boite cloche, mais ça coute un peu cher).
- Écrire les 5 scénarios restant et peaufiner ceux du prototype. Certains textes marchent moyen.
- Faire les illustrations pour les scénarios restant
- Faire toute la PAO des cartes et de la boite
- Discuter avec les éditeurs. Le voyage de Jean Claude au FLIP – Festival Ludique International de Parthenay, nous a mis en contact avec un très gros éditeur intéressé par le projet. Évidemment, ça changerait beaucoup de chose. Donc on verra bien, ej préfère pas en parler tout de suite.
- Faire imprimer le jeu (et espérer que ça se passe bien).
- Envoyer les jeux aux gentils contributeurs avant Noël
Avec ça notre été devrait être bien occupé. Dans tous les cas cette expérience du financement participatif a été passionnante et m’a permis de voir comment on pourrait l’optimiser. Referais-je d’autres financements ? Bonne question, mais finissons déjà ce projet.
Encore merci à tous pour votre générosité, à bientôt !