En bref !
– Des nouvelles de Jean-Claude. Merci à mes lecteurs de NovFut qui ont contribué au succès du financement participatif de Jean Claude (le jeu dont je vous ai parlé dans le dernier numéro).
Il ne reste plus qu’à passer à la fabrication du jeu et l’envoi aux acheteurs. Je vous tiendrai au courant
– Pour les parisiens, rendez-vous au festival des 50 ans des jeux de rôle à Senlis, le 21/09/24. Je pense y faire jouer à l’un de mes scénarios durant la journée et à Jean-Claude également.
Des baleines dans la SF
Après 50 ans d’essais plus ou moins infructueux, les chercheurs commencent – très lentement – à établir la communication avec des baleines (on en est à « coucou c’est moi » et « oui c’est toi« ). Un évènement extraordinaire car ce serait la première espèce pensante avec laquelle nous pourrions converser. Une espèce sauvage, non domestiquée, qui pourrait nous apprendre d’autres façons de considérer le monde. Alors en attendant ce futur souhaitable, je vous propose de plonger dans les histoires de baleines qui voguent dans les eaux claires de la Science-Fiction.
Baleines de l’espace
De Albator à Jack Vance, la métaphore de l’espace comme un océan que parcourent des vaisseaux spatiaux argentés s’impose dans la science fiction. Et qui dit océan dit forcément baleines qui s’imposent nageant aussi dans les courants galactiques.
Et quelle meilleur bande son que celle d’Echoes (Pink Floyd, Meddle, 1971) au thème à l’origine spatial (ils en ont fait une adaptation marine) où David Gilmour nous imite un chant de baleine avec sa guitare pendant 4 minutes. Il faudra demander l’avis aux baleines quand on saura communiquer avec elles.
Toujours dans le registre musical, le très beau Fantasia 2000 (1999, Hendel Butoy) nous propose une magnifique séquence de baleines aériennes, s’envolant à travers l’atmosphère vers une aurore boréale magique sous la musique Les pins de Rome de Ottorino Resphigi. Une séquence à vous faire dresser les poils du dos (je parle aux mammifères velus).
Encore chez Walt Disney, le mésestimé La planète au trésor (2002, Ron Clements et John Musker) nous propose une belle séquence dans où Jim observe des baleines cosmiques volant autour de leur vaisseau spatial que le Dr Doppleur baptisera Orcus galacticus. Bon, si on fait abstraction de la mauvaise 3D de l’époque, la séquence est très jolie.
Le très beau Titan A.E.(Don Bluth, Gary Goldman, 2000) raconte qu’une légende spatiale évoque des raies de l’espace aux chants qui ressemblent à ceux de baleines, avec un comportement qui évoque plutôt celui des dauphins.
Les baleines volantes sont également très nombreuses dans les romans de SF.
L’homme du labyrinthe de Robert Silverberg (1969) met en scène une race de créature ressemblant à des baleines et voyageant dans l’espace. Dans l’excellente trilogie Gaea (John Varley, commencée en 1979), la planète artificielle vivante Gaea accueille des baleines aériennes, des organismes génétiquement modifiés pour servir de dirigeables.
The Captains Table est une collection de nouvelles prenant place dans l’univers de Star Trek. La nouvelle Where Sea Meets Sky (Jerry Oltion, 1998), présente une race de créature à forme de baleines, capables de passer en hyperespace et base de la survie d’un monde. Sauf que la forme juvénile de ces baleines, détruisent un autre monde. Bref, une contradiction que va devoir résoudre le Capitaine Christopher Pike (celui avant Kirk).
L’univers de l’écrivain écossais Iain Banks aime beaucoup les grandes créatures spatiales dans son univers de The Culture.
On peut citer les Dwellers (The Algebraist, 2005), sortes de baleines volantes qui vivent sur des planètes gazeuses et auraient créé tout un réseau de trous de verre intergalactiques.
Dans Consider Phlebas (1984) : on découvre les Chuy-hitsi des créatures capables de voyager dans l’univers en passant par l’hyperespace.
Et dans Look to Windward (2000), on découvre le béhemothaur-dirigeable, une immense baleine volante qui vit sur une planète constituée uniquement d’air.
Les baleines volantes pullulent également dans la bande dessinée.
L’un de mes personnages de comics préféré des années 90 est Lobo, un mâle alpha ultraviolent et génocidaire (il a massacré sa planète Czarnia) qui n’aime qu’une seule chose en dehors de la bière, de la violence et de l’argent pour acheter de la bière : ses dauphins de l’espace. Lobo aime tellement les cétacés qu’il chevauche une moto-baleine dans le Noël de Lobo (Lobo Paramilitary Christmas Special, Alan Grant, Simon Bisley, 1992), l’un des ses épisodes les plus connus (et les plus drôles).
En passant, j’avoue être impatient de voir le traitement que l’excellent James Gunn va faire subir à Lobo dans sa prochaine adaptation ciné.
Sur la planète océanique Aquablue (bande dessinée incontournable de Thierry Cailleteau, Olivier Vatine, puis Blanchard et Tota), on trouve les Uruk-Uru, immenses créatures d’environ cinquante mètres d’envergure, croisement entre des baleines et des raies manta, qui peut plonger à plusieurs kilomètres de profondeur. Il semblerait que ces créatures aient des capacités psycho-sensitives et sont réceptives aux appels de certains humains (habitants de Aquablue). On trouve bien d’autres espèces de cétacés-like sur Auqablue comme les Procélodons, des sorte de dauphin zébrés ou Taehae-nui, un prédateur d’une dizaine de mètres.
Toujours en BD, il est indispensable d’évoquer les Baleines Publiques, premier album de Broussaille de Franck Pé (1984). L’un de mes albums de BD franco-belge préféré que l’on pourrait tout à fait mettre dans la case Science-Fiction.
L’histoire est très belle : Broussaille, le plus écolo des héros, fait des rêves étranges, où la faune aquatique se mélange aux rues parisiennes, alors que les gens « normaux » font des crises d’insomnie. Il va enquêter sur ce phénomène étrange dont l’origine est une baleine qui rêve.
Cette bande-dessinée splendide, aussi bien par ses dessins magnifiques mais aussi par son scénario sensible et écologique est une véritable œuvre d’art narratif comme on savait les faire à cette époque.
Le massacre des baleines
Si aujourd’hui la chasse aux baleines est censée être interdite depuis 1986, le destin des baleines a beaucoup inquiété les auteurs de SF. Avec raison : si on compte 134 espèces de mammifères marins dans le monde, plus d’un tiers sont toujours menacées d’extinction (IUCN – International Union for Conservation of Nature) et 5 ont déjà disparues.
L’œuvre de SF populaire la plus emblématique de cette volonté de protéger les baleines est certainement Star Trek IV, The Voyage Home (1986, réalisé par Leonard Nimoy himself).
En 2286, une sonde spatiale se dirige vers la terre, en émettant un signal étrange qui crée des perturbations dangereuses. Spock (Leonard Nimoy, donc) décode le message qui s’avère être similaire au chant des baleines à bosse et qui attend une réponse. Problème : les baleines à bosse ont disparues de la terre au 21e siècle (un futur toujours probable). L’équipage de l’Entreprise va donc devoir retourner dans le temps, en 1986, pour récupérer un couple de baleine et l’emmener dans le futur.
– Spock: “To hunt a species to extinction is not logical.«
Star Trek, The Voyage Home
– Dr. Gillian Taylor: « Whoever said the human race was logical?”
D’autres auteurs préfèrent parler du destin de baleines extra-terrestres. Rodney Matthews, peintre illustrateur de Science-Fiction, a réalisé une peinture iconique de chasse à la baleine (Stop the Slaughter) très connue dans les années 70.
On y voit un bateau spatial chassant une belle baleine cosmique et laissant derrière lui une traine de squelettes de cétacés. Une métaphore de l’extractivisme des océans terriens.
On apprend dans Prelude to Dune (Brian Herbert et Kevin J. Anderson, 1999) que les robes de la princesse Irulan sont faites dans la fourrure de Bjondax, des baleines bleues ou grises vivant sur la planète Lankiveil. Il semblerait que la fourrure de ces baleines a une très grande importance sur les marchés impériaux (au contraire des baleines dont les marchés se moquent).
Sur Pandora, dans Avatar 2 la voie de l’eau (James Cameron, 2022, tellement inspiré par Aquablue que ça en est gênant), le héros Jake part à la défense des TULKUN des mammifères marins de 90 mètres de long sensibles et intelligents, massacrés par les méchants humains dirigés par le colonel Quaritch (mais qu’est-ce qu’il est méchant).
La scène de massacre des Tulkun est très réaliste, violente et sanglante, rappelant les pires vidéos des massacres de baleine perpétués par les bateaux de « chercheurs » japonais en train de faire des « prélèvements scientifiques ». James Cameron aimerait la mer que ça m’étonnerait même pas…
Ceci dit, on peut aussi être fasciné par l’idée de l’affrontement entre les petits hommes et ces créatures gigantesques. C’est la base de ce proof of concept pour un film (qui ne verra jamais) le jour et qui raconte une chasse aux léviathans spatiaux dont les oeufs permettent de voyager à la vitesse de la lumière. Un mélange de Dune et de Avatar réalisé par Ruairi Robinson.
Et puis, même si il n’y a pas de pêcheurs de baleine sur la lune, on en inventera. C’est ce que nous raconte Futurama (whalers on the moon).
« We’re whalers on the moon We carry a harpoon… But there ain’t no whales So we tell tall tales And sing our whaling tune! »
— Futurama
Des animaux doués de raison
Les baleines sont intelligentes, elles possèdent des noms, chantent, jouent, bavardent, apprennent, développent des cultures spécifiques qui se propagent entre populations et font même preuve d’altruisme.
Aussi, qui pourrait leurs nier le statut d’être pensant ? L’égo de l’humanité certainement.
– McCoy: This is the probe’s way of saying, « Hello » to the people of Earth?
– Spock: There are other species on earth. Only human arrogance would assume the signal must be meant for mankind.Star Trek The Voyage Home
Dans World Of Ptavvs (1966), premier roman de l’immense épopée spatiale de Larry Niven à la fin du 20e siècle, l’humanité reconnait aux baleines, le statut de personnes intelligentes qui vont en profiter pour nous trainer en justice pour nos exactions passées. L’humanité accusée de génocide de mammifères marins, en voilà une excellente idée.
Un animal doué de raison (Robert Merle, 1967) raconte comment une équipe de scientifiques apprennent l’anglais à des dauphins, hélas à la veille d’une 3e guerre mondiale aux objectifs pas vraiment scientifiques. Un roman de SF basé sur des réalités scientifiques (aujourd’hui évidentes), qui a eu une adaptation en BD dans le journal Pif gadget en 1979 (où je l’ai lu la première fois). Le roman a également donné lieu à un film The Day of the Dolphin (1973, Mike Nichols). Pas vu.
Chez Douglas Adams, les dauphins dont l’intelligence ne fait aucun doute quittent la terre juste avant sa destruction par les Vogons dans le Guide du routard galactique (The Hitchhiker’s Guide to the Galaxy, 1979), ne nous laissant que ce message obscur “So Long, and Thanks for All the Fish” (*qui s’avère être d’ailleurs le titre du 4e tome de la série H2G2, si c’est pas une coïncidence ça).
“ Par exemple, sur la planète Terre, l’homme a toujours considéré qu’il était plus intelligent que les dauphins sous prétexte qu’il avait inventé toutes sortes de choses — la roue, New York, les guerres, etc. — tandis que les dauphins quant à eux, n’avaient jamais rien su faire d’autre que faire joujou dans l’eau et plus généralement prendre du bon temps. Mais, réciproquement, les dauphins s’étaient toujours crus bien plus intelligents que les hommes — et précisément pour les mêmes raisons. ”
H2G2, Douglas Adams
Le cycle de l’élévation de David Brin raconte que les humains ont fait évoluer d’autres espèces terrestres (les néo-chimpanzés et les néo-dauphins) grâce à un processus génétique artificiel : l’élévation (la provolution).
Le premier roman Jusqu’au cœur du soleil (Sundiver, 1980) nous présente ces néo-dauphins, navigateurs dans un vaisseau spatial humain qui va rencontrer une race extra-terrestre. C’est l’occasion de présenter les différents langages des dauphins (dont le Ternaire composé d’haïkus poétiques, quelle idée magnifique).
Le deuxième roman Marée stellaire (Startide Rising, 1983) suit cette fois un vaisseau, le Streaker, placé sous un commandement néo-delphinien. Tout le vaisseau est adapté pour les cétacés, alors que les humains doivent évoluer en combinaisons de plongée. Un régal pour les amateurs de baleine, surtout que l’auteur n’évite pas certains traits les plus désagréables des dauphins, certains n’hésitant pas à violer leurs femelles. Grâce à Novfut, toi aussi regrettes ton tatoo de dauphin à la cheville pour crâner sur la plage.
32 ans après son cycle de l’Elevation, David Brin écrit Existence (2012) qui contient à nouveau des dauphins “élevés”. Ce pavé de Hard-SF est un monument à lire (notamment pour son interprétation sur le paradoxe de Fermi – oui promis je ferai un NovFut sur le sujet un jour).
L’immense univers de Star Trek contient beaucoup de cétacés sur Terre ou sur d’autres planètes. L’invention du traducteur universel permettra d’officialiser l’intelligence des cétacés terriens. Un peu comme chez David Brin, les cétacés sont spécialistes en navigation spatiale et sont même consultés pour concevoir en partie le système de guidage navigation de l’Enterprise NCC-1701-D (dans Star Trek TNG U.S.S. Enterprise NCC-1701-D Blueprints).
On retrouve d’ailleurs deux officiers beluga Kimolu et Matt sur le U.S.S. Cerritos dans la série d’animation Star Trek: Lower Decks (Mike McMahan, 2020).
D’autres baleines “intelligentes” se battent dans Cachalot (1980), deuxième roman de la série Humanx Commonwealth de Alan Dean Foster.
Cachalot est le nom d’une planète océan où les cétacés de notre Terre furent implantés il y a 600 ans pour éviter leur disparition. Les cétacés ont évolués et ont même développé des langages différents entre orcs, dauphins et baleines, etc.). Ils semblent avoir pardonné aux humains leur presque-extermination, mais pourtant quelque chose détruit les villes flottantes humaines (forcément extractivistes). Une équipe humaine va donc aller enquêter sur la planète… Et la fin vous surprendra (je ne divulgache pas).
Les Rukhs (Saturn Rukh, Robert L. Forward, 1997) sont des baleines volantes qui vivent dans les profondeurs de l’atmosphère de Saturne. Elles se comportent comme des baleines même si elles ont une envergure de 4 kilomètres et une forme plutôt d’oiseau et mangent des créatures plus petites (de la taille de nos baleines). Elles sont pacifiques, vivent en sociétés tribales et apprendront vite à parler aux protagonistes.
Après la domestication des dragons, Anne Mc Caffrey raconte celle des dauphins dans les Dauphins de Pern (1994). On y retrouve la naissance des premiers Dolphineurs (au lieu des chevaliers-dragons) qui vont essayer de démontrer l’intelligence des et les qualités communicatrices des dauphins.
Le jeu de rôle Eclipse Phase nous propose plusieurs baleines membres de la société transhumaniste (et qui peuvent donc être incarnées par les joueurs) comme les Suryas, baleines immortelles vivant dans le soleil.
Je ne connais pas de scénarios qui ferait intervenir les Suryas, mais ça vaut le coup de se pencher sur la question. Car qui n’a jamais rêvé de jouer une baleine de l’espace ?
Enfin, un petit clin d’œil évident à Jones, le dauphin cyberpunk de Johnny Mnemonic, présent dans la nouvelle de William Gibson (1986) et dans le film avec Keanu Reeves (Robert Longo, 1995).
Jones est un dauphin cyber-augmenté, vétéran de l’armée qui sur-exploitait ses capacités de décryptage. Dans la nouvelle, Jones est accro à la drogue par les Lo-Teks qui l’utilisent pour leurs fins. Dans le film, Jones aide Johnny à cracker son propre cerveau pour récupérer sa mémoire. Les deux œuvres mettent en avant l’intelligence de cet animal (et son exploitation par l’homme).
Moby Dick dans l’espace
Moby Dick de Herman Melville est l’un des romans fondateurs de la littérature américaine, connu de tous les petits américains (ce à quoi les américains ont eu plus de chance que nous français, abreuvés à Madame Bovary).
Cette histoire de l’obsession d’un homme pour un cachalot a été ainsi reprise moults fois dans la Science Fiction.
Dans la nouvelle Leviathan ’99 (1950), Ray Bradbury transpose Moby-Dick en 2099 où la baleine est remplacée par une comète alors que le vaisseau et les personnages gardent à peu près ceux du roman original.
En 1968, la BBC en fera une adaptation radio avec Christopher Lee (en capitaine Ahab) et Denys Hawthorne (en Ishmael).
Philip José Farmer a écrit une suite de Moby Dick appelé The Wind Whales Of Ishmael (1971) où l’on retrouve Ishmael et le Pequod (le bateau d’Ahab) dans une histoire à base de terre alternative, de baleines volantes chassées par des vaisseaux aériens.
Dans La Baleine des sables (Involution Ocean, Bruce Sterling, 1977), un toxicomane est embauché sur un baleinier pour se rapprocher des baleines de poussière qui vivent sous la surface du monde confiné de Nullaqua et dont l’huile est une drogue interdite sur la planète. Un roman qui emprunte autant à Moby Dick qu’à Dune ou à 20 000 lieues sous les mers.
Le magazine de SF anglais 2000 AD a proposé la série A.H.A.B. (2004) pur concentré de SF qui se déroule en 2086 où l’humanité étant mise en danger par un virus, elle cherche son salut dans le cerveau du Kohenyu, une créature qui existe dans d’autres dimensions et qui apparait occasionnellement dans la notre. Un équipage de scientifique guidé par Ishmael (une femme cette fois) va tenter de trouver le remède, pendant que le robot AHAB va tenter de tuer la créature par pure vengeance. Forcément, avec un nom comme ça.
Futurama nous propose une parodie de Moby Dick avec l’épisode Möbius Dick (2011, 6e saison) où Leela veut devient obsédée par l’idée de chasser une baleine spatiale de la 4e dimension, des sortes de cachalots spatiaux qui vivent dans la 4e dimension (forcément) mais qui viennent de temps à autres dans la nôtre pour chasser.
Dans le superbe Star Trek II: The Wrath of Khan (Nicholas Meyer, 1982), le méchant Khan Noonien Singh est obsédé par l’idée de chasser et tuer le Capitaine Kirk (sa baleine blanche à lui).
Les derniers mots de Kahn sont exactement ceux du Capitaine Ahab dans le livre de Melville : « No… no, you can’t get away. From hell’s heart, I stab at thee. For hate’s sake, I spit my last breath at thee.« .
Living ship
L’un des tropes de la science fiction est celui du léviathan cosmique servant de vaisseau spatial. Certains y verront la représentation de l’astuce de l’humanité, d’autres de sa capacité à exploiter (et asservir) tout ce qu’elle trouve.
Le regretté Terry Pratchett dans The Dark Side of the Sun (1976) évoque des grandes créatures nées dans l’espace appelés les sundogs. Elles peuvent être louées pour aider à transporter des marchandises ou même des vaisseaux spatiaux.
Dans l’exceptionnelle série des Métabarons (Jodorowsky, Gimenez) issue l’univers de l’Incal, les méchants utilisent un cetacyborg un vaisseau spatial organique qui ressemble à une baleine développé en ingénierie génétique.
Le vaisseau Leviathan des méchants Chitauri (The Avengers, 2012) est également un cyborg plus ou moins bio-engeneeré d’une baleine de l’espace. De là à dire que Disney (et Hollywood) repompent joyeusement les idées de crypto-artistes, c’est un pas que je ne franchirai pas par peur d’un procès en diffamation.
D’ailleurs les Broods, une race d’alien métamorphes pas sympas qui hante l’univers des X-Men utilise également des baleines de l’espace lobotomisées comme moyen de locomotion avec des variantes comme celle-ci qui incorpore des résidus de Charles Xavier.
Beaucoup plus pacifiques sont les baleines de Schrödinger (quel nom génial) du manga Ah! My Goddess (Kōsuke Fujishima, 1988), qui peuvent traverser entièrement le continuum espace temps. Les chances de l’existence d’une baleine n’étant que de une sur l’infini de l’espace, il est très dur pour elle de trouver une autre baleine de Schrödinger pour se reproduire.
La très sympathique série TV Farscape se déroule à bord du léviathan Moya, sorte de baleine de l’espace pacifique sans armement. Les léviathan sont reliées à un pilote qui sert de navigateur et de lien avec l’équipage. Dans la série, Moya est sauvée des pacificateurs (les méchants de Farscape) par son nouvel équipage qui va vivre plein d’aventures, jusqu’à la naissance de son bébé Talyn à la fin de la saison 1.
Le jeu de rôle générique GURPS: Spaceships propose des baleines de l’espace de 300,000 tonnes dans lesquelles il est possible de survivre. Leurs utérus peut être modifié pour accueillir des lignes de production bio-technologiques.
Toujours dans les jeux de rôle, mais cette fois dans Pathfinder et Starfinder, on trouve les Omas, de très grandes créatures (45 m de long pour 250 tonnes) dont le corps crépite d’arcs d’énergie. Les Omas vivent dans les profondeurs de géantes gazeuses et parcourent le vide de l’espace en volant sur des champs électromagnétiques magiques. Leurs estomacs sont habitables et certaines races extraterrestres sont capables de les contrôler par télépathie, et donc les utiliser comme vaisseaux vivants.
Conclusion
La SF a exprimé toutes les facettes de la fascination de l’humanité pour les baleines : le respect, la vénération, mais aussi la peur (Moby Dick) ou l’exploitation pure et simple. Mais malgré cette fascination, le futur des baleines n’est pas assuré.
Coïncidence cosmique, au moment où je boucle ce NovFut (juillet 2024), j’apprends que Paul Watson, l’activiste écologique fondateur de Sea Shepherd, a été arrêté au Danemark (pays de tueurs de baleines) pour être extradé au Japon (un autre pays de tueurs de baleines) pour « conspiration d’abordage ». On peut en rire si ce n’était si tragique.
Paul Watson est une sorte d’Albator des mers qui traque les pêcheurs (massacreurs) de baleine illégaux, le tout sans violence mais avec beaucoup de perte financière de la part des multinationales derrières les pêcheurs. Car même si la chasse a la baleine est officiellement interdite depuis un moratoire adopté par la Commission Baleinière Internationale en 1986, certains pays ne se gênent pas pour continuer de massacrer nos cétacés. Ainsi, si le Japon fait aboutir sa demande, alors ca voudrait dire que la communauté internationale se met d’accord pour laisser tuer les baleines en regardant ailleurs (voire punir ceux qui veulent les empêcher). Tiens, la pétition pour demander la libération de Paul Watson est ici.
Il peut être salutaire de prendre quelques moments de réflexion avant cette rentrée 2024. Car au moment où des apprentis sorciers imbéciles tentent de créer des intelligences artificielles dont l’objectif est d’abrutir leurs utilisateurs, d’autres détruisent les autres formes d’intelligences qui peuplent déjà notre planète et qui pourraient un jour ouvrir nos horizons mentaux.
On pourrait considérer les baleines comme les garants de notre humanité. Le jour où la dernière baleine disparaitra, il faudra arrêter de nous appeler des humains pour nous auto-baptiser des parasites ou des virus, c’est à dire des êtres qui détruisent leurs écosystèmes pour se propager.
Vaut-il alors mieux se faire traiter de terroriste écologique ou de parasite extractiviste ? Il serait bien que ce ne soient pas les industriels puissants qui choisissent pour nous.
Cyroul (Juillet 2024)
Ce Novfut spécial baleine est terminé, j’espère qu’il vous aura fait rêver de pâturages galactiques et de communication inter-espèces. Peut-être qu’il aura aussi secoué votre fibre romantique ou écologique. Dans tous les cas, j’espère que vous aurez passé un bon moment. En attendant le prochain (consacré à l’hyper-espace sauf si l’actualité me propose un autre sujet) je vous souhaite une bonne rentrée, pleine de récits positifs pour inventer le futur.
De mon côté, je vais continuer plus que jamais cette année à faire travailler mes clients sur des récits du futur.
Tout en continuant à écrire les miens.