Des chiffres pour les Facebook-couillons (F-couillons)

Ce matin je regardais la toujours très réussie revue du lundi de WAS, quand je suis tombé sur ce chiffre :  89% des agences de publicité s’apprêtent à utiliser Facebook pour leurs clients… Cela m’a laissé un sale goût dans la bouche. L’impression que les agences (et les annonceurs qui les écoutent) ne lisent que les chiffres qui les arrangent. L’impression d’être revenu à l’époque SecondLife où les investissements étaient réalisés n’importe comment, « pourvu qu’on y soit ».

Alors, j’ai décidé de vous donner d’autres chiffres. Pas les statistiques sur le nombre d’heures de connexion du mâle blaireau moyen sur Facebook, ni sur les sommes faramineuses que la femelle blaireau va donner à Zynga. Ceux là vous les trouvez partout. Non, d’autres chiffres. Ceux qui font mal, mais finalement les plus importants, car riches d’enseignement sur les pratiques des internautes. Les chiffres qui vous permettront peut-être de relativiser votre futur F-investissement et de construire une stratégie Facebook pérenne loin d’un engouement béat pour la nouveauté. Bonne lecture !

17%


Les status des pages Facebook de marque ne toucheraient que 17% des fans. C’est pas moi qui le dit, c’est AllFacebook. On y apprend donc que pour une fanpage moyenne, vous ne touchez effectivement qu’1 fan sur 6. 5 fans sur 6 ne vous voient tout simplement pas.

Vous devez donc enlever 83 % de vos fans quand vous comptez votre audience ! Espérons que l’acquisition de vos fans ne vous a pas couté trop cher…

-58%

C’est la baisse des impressions moyenne des articles sur Facebook depuis juin 2011. Les pages sont en effet passées de 0.99 impressions par fan en juin à 0.41 en décembre 2011. L’impression étant la visualisation d’un article , qui dépend de votre audience et de la fréquence d’apparition de l’article.

En clair : Impressions = Reach * Frequency

Et cette impressions baisse. Déjà parce que l’audience réelle baisse (cf. 17%) mais aussi parce que les wall de vos facebooker sont surchargés. Et sachez qu’ils préfèreront toujours regarder une vidéo de chat crétin qu’une superbe publicité qui dit que vos produits sont les meilleurs.

Espérons que vos articles ne vous ont pas coûté trop cher à produire…

1%

Seulement 1% des fans s’engagent avec la marque sur Facebook nous dit l’Institut Ehrenberg-Bass. Vous comptez les likes, posts, comments, tags, shares et toutes les façons que peut avoir un utilisateur de réseau social d’interagir avec la marque, et vous obtenez donc 1 % d’interaction. Facebook se transforme peu à peu en média de masse, et certainement pas en un moyen d’échanger avec vos prospects et vos clients. Pas étonnant que beaucoup d’agences et d’annonceurs habitués au mass media (Internet étant du « hors média ») retrouvent leurs marques (jeu de mot) sur Facebook où l’utilisateur Facebook est enfin redevenu un temps de cerveau disponible.

Espérons que vous ne vouliez pas vraiment créer une communauté sur Facebook…

3 heures

3h, c’est la durée de vie d’un post sur Facebook d’après EdgeRankChecker. 3h pendant lesquelles votre lien a une chance de tourner et de se propager. Après ces 3 heures l’engagement baisse (pour la définition de l’engagement voir le 1%).

Espérons vraiment que votre contenu n’a pas été payé trop cher…

Call of Duty

Pour finir une petite citation qui pourrait servir à ceux qui présentent les chiffres de fréquentation de Facebook comme l’argument imparable préalable à toute opération : « The average Call of Duty player spends 58 minutes per day playing multiplayer. This is more than the average Facebook user spends on Facebook each day. » (une superbe opé très bien pensée de Amnesty International). Ce qui voudrait dire que vous devez absolument investir sur Call of Duty pour créer vos fan pages.

Espérons vraiment que vous ne vendez pas de crèmes de beauté.

Conclusions

Oui il faut être sur Facebook ! Je vous le dit depuis 2007 pourtant à cette époque, personne n’en parlait dans la pub. Il fallait au contraire investir sur Skyblog, sur MSN, ou éventuellement sur MySpace pour les plus avancés. Mais de Facebook, non point. Aujourd’hui c’est le contraire. Tout le monde veut faire du Facebook et éventuellement du Twitter pour les plus avancés. Résultat : une débauche d’investissements de plus en plus massifs sur ce réseau social.

Car ces investissements Facebook ne peuvent plus baisser. Les chiffres ci-dessus sont catastrophiques pour les petites et moyennes marques qui investissent facebook. Car ils sont en effet modérés en fonction de la taille de votre présence sur FB (et donc de votre investissement). Ce qui signifie que soit vous investissez en masse, soit vous n’existez pas. Un peu comme pour les médias traditionnels quoi. La boucle est bouclée, les agences de pub et les agences médias sont contentes et le client retombe sur des logiques de mesure traditionnelles (remplacez GRP par taux d’engagement et tout le monde est content). Youpi !

« Youpi » rien du tout. Le consommateur a changé. Il ne veut plus qu’on le prenne pour un con. Alors investir Facebook avec cette vision ROIste court-terme c’est se préparer des lendemains qui déchantent. Par contre, investir Facebook avec une vraie vision des usages de l’internaute social, une vraie volonté d’insérer sa marque dans ces nouvelles pratiques, alors là ça peut payer.

Si l’on peut retenir quelque chose de la plantade publicitaire de Second Life, c’est bien ça, vous ne croyez pas ?

Author: Cyroul

Explorateur des internets et créateur de sites web depuis depuis 1995, enseignant, créateur de jeux, bidouilleur et illustrateur. J'écris principalement sur les transformations sociales et culturelles dues aux nouvelles technologies, et également sur la façon dont la science-fiction voit notre futur.

32 thoughts on “Des chiffres pour les Facebook-couillons (F-couillons)

  1. Avec la timeline, donc avec la disparition de l’onglet affiché par défaut et l’arrivée des Listes d’intérêt, facebook semble vouloir reprendre en main le concept de fan.
    je me demande ce que ça va couter aux marques en terme de recrutement marketing des fans. Cher.

  2. J’adhère d’autant plus que nous avons fait depuis le début de MEDIA aces Le zoom sur ce changement de comportement et la nécessité d’un autre Marketing. Hervé Kabla et moi avons beaucoup écrit en ce sens et notre conf du 6 mars sera sur ce thème.

    Hélas, les fondamentaux des médias sociaux s’en sont allés on a oublié les principes et fait du marketing de masse qui sera / est inefficace.

    Il faut revenir aux fondamentaux du WOMM. Merci de votre article fort bien fait

  3. @Jérémie
    On peut savoir ce qui est faux dans ce billet ? Parce que je suis suis toujours preneur de sources sérieuses qui diraient le contraire.

    (voui, tard le soir, j’aime parler avec les trolls)

  4. C’est n’importe quoi ce post. Les pages fans on s’en fout, la valeur de FB c’est l’open graph, qui va défoncer le CRM, comme Criteo a défoncé le display.
    Le mail est mort. Vive Facebook.

  5. @Neil.
    Pas de problèmes. Tu fais de la stratégie !!
    Tu sais, le truc que toutes les agences te vendent et que tu ne vois jamais.

  6. Et alors, avec tous ces articles critiques dans tous les sens sur tous les sites, je ne sais plus quoi faire…
    – Faut-il faire du display ou ne faut-il pas en faire parce que ce format est tout sauf adapté au web aujourd’hui ? (alors que le clic est roi aujourd’hui pour agences et annonceurs)
    – Faut-il investir dans internet comme dans n’importe quel mass media ?
    – Quels sont les bons indicateurs d’efficacité ? Le like n’ayant même pas de valeur…
    – Quant au brand content, ne parlons même pas de son ROI…

    Bref, je ne sais plus quoi faire. Je crois que je vais me faire une bonne strat 360 haha. Ça me changera.

  7. Bravo j’ai fais le choix de sortir facebook de mes reco et tu me donnes tous les chiffres pour maintenant expliquer mon intuition ^^

  8. Excellent ! Je rencontre beaucoup des marques qui ont acheté des fans et se demandent maintenant qu’en faire… La question n’est plus d’investir ou non sur Facebook. Elles y sont. C’est maintenant de faire le lien avec le monde réel, savoir si les fans sont des clients ou peuvent le devenir par exemple.

  9. Superbe article confirmant ce que j’ai vu sur un des sites que je gère. Assiterait on la mort de facebook?

  10. Salut… Une petite erreur d’interprétation : « Les status des pages Facebook de marque ne toucheraient que 17% des fans »
    => En fait, c’est UN statut qui ne touche que 17% des fans (parce que les 83% autres ne sont pas devant l’écran au bon moment). Ça ne veut pas dire que seuls 17% des fans totaux sont captifs :)

  11. Il me semble que le consommateur n’a jamais voulu qu’on le prenne pour un con et qu’il a toujours réagi selon des produits ou marques qui lui sont proposés.

    La modification vient bien de son comportement et de la portée que peuvent avoir ses réactions.

    La « création de communauté et l’engagement sont pour moi toujours envisageables mais plus facilement pour des marques largement grand public qui ont accès aux media de masse. A moins qu’ils ne se mettent à faire de la merde, je continuerai à liker la dernière campagne Nike parce que… j’aime cette marque et que le film est bon.

    Le problème de la stigmatisation de ces chiffres, malgré leur grande pertinence, est d’occulter les disparités gigantesques qui doivent exister entre les marques et entreprises, selon l’utilisation qu’ils font des médias.

    En matière publicitaire, il me semblerait bon de souligner, enfin, que le système de publicité ciblée de facebook recèle des trésors d’ingéniosité. Avec les réserves classiques sur l’accès aux données personnelle, mais nous sommes tous assez « facebook couillons » pour les livrer à la plateforme…

    En synthèse je dirais que ton billet est essentiel, qu’il défend une cause noble pour les annonceurs, mais qu’il est un poil caricatural. En même temps je suis le premier à utiliser l’artifice :) et puis plus personne lit les commentaires de blog à part l’auteur c’est bien connu.

    1. Tu as forcément raison en disant que ce post est un peu caricatural. Mais il faudrait l’écrire dans ce cas sur tous les billets qui balancent des statistiques  et chiffres sur Facebook, récupérées on ne sait où, on ne sait comment, et surtout balancés sans aucune nuance.

      Le but d’un post comme ça est justement de casser cette avalanche de chiffres. Vous en lisez toute la journée qui disent que Facebook c’est super, et bien en voilà qui disent le contraire. 
      Ca fait réfléchir. C’est donc pédagogique.

      L’article ultime sur les bonnes pratiques Facebook attendra que j’ai beaucoup beaucoup de temps pour l’écrire :)

  12. C’est compliqué… Je veux dire, faire parler d’une marque neutre (qui n’engage pas naturellement, comme une marque de boisson ou autre mass market) sur le web ce n’est pas simple. Si vous y ajoutez le fait qu’il faut faire valider votre idée à la direction générale de la marque en question…. 

    Donc les agences se rabattent sur des metrics et des solutions simplistes… 

  13. Pour une fois que tout le monde est d’accord; Buvant ensemble! C’est beau. Buvons ensemble encore!

    (j’ai toujours su que quelqu’un oserait en parler, un peu en écho à @gregfromparis certes)

  14.  Pour info, la superbe opération Amnesty / Call of Duty n’existe pas. C’est un projet d’étudiants qui n’a pas été retenu car Call of Duty est quand un chouilla violent et en contradiction avec l’image d’Amnesty

  15. J’ai l’agréable sentiment de lire sous la plume d’un autre, ce que je me tue a répéter autour de moi depuis des lustres (passant au mieux pour un fou, tant le discours unique est prégnant sur Internet en ce moment chez nos « experts ») 

    Bravo pour cet article, puissant et argumenté

  16. Oui mais la pub en général, sur n’importe quel support, n’est pas plus efficace, si ?? ….et encore bien si j’ai pas les tunes pour acheter tout ce qui passe :D

  17. Pareil, j’adhère tout à fait à la vision. Mon interprétation serait la suivante :
    1- Puisque tout le monde y est et que votre patron le veut, vous devez y de toute façon être sur Facebook ;
    2- La concurrence et les CGU de Facebook font que ce n’est pas un environnement pérenne, donc n’espérez pas construire quoi que se soit et adoptez une approche purement opportuniste ;
    3- Investissez dans des supports que vous maitrisez et qui vont vous aider à atteindre vos objectifs métiers (image, ventes, satisfaction…) et non les KPIs bidons fournis par les agences qui servent à justifier leurs honoraires.

  18. Cyroul. Je partage ton avis sur les opés et les fan pages. En revanche, l’article que tu cites stipule clairement que l’utilisation de Facebook dont il est question est marketing au sens large, incluant donc la partie média de la bête, qui est loin de manquer de reach et d’avantages.

    « Note that this doesn’t necessarily mean the agencies will be using ads on these social networks: it just means they want to use the platforms to market for their clients, whether that be with ads, Facebook Pages, Google+ Pages »

    Du coup je me dis que ton article est un peu biaisé, non? Une agence de pub qui achète des campagnes chez Facebook est a mon avis complètement au courant de ce que ça rapporte à son client, et par conséquence je pense que les investissements ne sont pas toujours réalisés n’importe comment, pour reprendre tes mots.

    1. Hi Clément
      Heu, je ne crois pas avoir écrit que les investissements Facebook étaient toujours réalisés n’importe comment. 
      Et je ne pourrai pas le dire, il y a des agences très stratégiques sur Facebook et des annonceurs suffisamment malin pour leur faire confiance. Et certaines opérations Facebook sont des succès aussi bien en terme d’audience que d’engagement.

      Et effectivement, une agence qui achète du support pub chez Facebook est forcément au courant de qu’elle va obtenir (ce qui ne veut pas dire que l’annonceur le soit lui). Donc si elle décide de faire une campagne display, elle aura forcément anticipé son « ROI » (pour faire GRP).
      Mais on est loin du dispositif FB à gros budget et sans display que je critique ici.

  19. Je ne peux que te rejoindre sur ces chiffres et sur le danger de pousser toujours des chiffres valorisant la course aux fans. 

    1. Bonjour,

      Ces chiffres sur Facebook sont très instructifs. La première image de l’article est décapante !

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