Vous n’en avez pas marre de vous farcir toujours les mêmes campagnes sur le web, vous ?
Moi si. Marre de voir toujours les mêmes stratégies de communication interactives qui sont censées fonctionner et qui ne resteront que quelques microsecondes dans la tête de vos chers consommateurs. A croire qu’ils ont tous lu les stratégies digitales pour les nuls (sans remarquer que cet article date de 2007).
Bien sur, il va toujours y en avoir (les bons vieux pubards de la pub lave-vaisselle et ceux qui veulent s’enrichir sur le dos de leur clients mal informés) pour clamer que ce sont des campagnes géniales, 360°, cross médias, globales et tutti quanti, et qu’elles assurent une visibilité phénoménale pour la marque/produit. Ils vont même jusqu’à utiliser le mot buzz ou même « word of mouth » devant leur client fasciné…
Tespaskap de choisir une campagne au pif
J’ai pris une campagne au hasard (il y en a à peu près une par semaine dans le même genre, mais celle-ci était plus visible). Par contre j’ai choisi volontairement un sujet de communication compliqué : l’assurance.
Pourquoi compliqué ? Parce que le secteur des banques/assurances est un des secteurs les plus étrangers (et douillets) à la notion d’expérience online. « On est là pour faire de la page vue monsieur » Croyez moi, je sais ce que je dis. Il y a bien la BNP qui avec ses campagnes jeunes ont crée de mini-évènements (merci Eric et Ramzy), mais sinon c’est plutôt le calme plat dans ce secteur.
J’ai alors choisi comme exemple la campagne Tespakap de Mondial Assurance. Celle-ci vient juste d’être lancée et elle a déjà fait suffisament de bruit pour qu’on sache que le budget était conséquent.
Tespaskap de disséquer cette campagne
En accord avec les grands principes de la stratégie digitale pour les nuls (ceci était une publicité gratuite), nous allons découper cette campagne en 4 parties.
1/ la capture de l’internaute
- Du RP (oh, le beau communiqué sur le journal du net : Mondial Assistance lance sa première campagne de buzz)
- De la bannière (sur Blogband.com et Msn.fr)
- Des vidéos virales… heu… sur Dailymotion. C’est à dire des vidéos qui pourraient éventuellement faire rire vos grands parents… Et encore. On sent bien hélas que ces vidéos ont été édulcorées. Les chutes laissent à désirer (censurées ?).
- Du RP blog. Je ne sais pas en quoi a consisté l’opération. N’hésitez pas à témoigner si vous avez été contacté.
2/ l’expérience
Un site magnifiquement réalisé. Si, si il faut le dire. Propre, beau, rapide (je ne plaisante pas)…
Hélas, il s’agit d’un sublime écrin pour une petite crotte. Car hélas, le site n’a aucun autre intérêt que celui d’essayer de justifier les vidéos virales. Alors forcément on y retrouve la présentation des différentes disciplines et des personnages des vidéos, mais aussi des photos, des goodies (des fonds d’écrans immondes et même une carte de membre en PDF), etc. Mais qui va installer ça sur son écran ? Vraiment ? Et qui va lire ces bêtises ?
Les vidéos peuvent évidement être envoyées à un ami qu’on aime pas ou ajoutées sur votre blog… Mais bon, la viralité de ces vidéos ne me convainc pas. Elles ne sont tout simplement pas drôles. Ca manque de gore et de spontanéité tout ça. Censure du client ou auto-censure ?
4/ l’au-revoir
Le lien découvrez notre offre habitat pointe vers le site officiel de l’assurance… Et là, votre esprit ne comprend plus comment vous avez pu passer d’une histoire légère (des papys qui s’envoient en l’air) à un site carré, institutionnel où l’on vous demande de vous inscrire. La pression étant trop forte, vous vous écroulez victime d’une embolie cérébrale, ou pire encore, vous fermez votre navigateur, dégoûté des campagnes on-line.
Tespaskap de me dire ce qu’il s‘est passé ?
Le manque de saveur de cette campagne peut trouver 3 explications :
- La stratégie a été construite par un directeur de clientèle qui a trop lu CBnews ou Stratégies et qui n’imagine même pas qu’un internaute ne se fasse pas prendre à ce dispositif (« Ben quoi ce genre de trucs marche depuis 2 ans, pourquoi ça ne marcherait plus ?« )
- Le client était frileux (« Ah non, les chutes sont trop gores, coupez les! Mais monsieur le client ce n’est plus viral! Mais si c’est suffisamment drôle comme ça. La preuve, ça a fait rire Henry de la compta. »).
- La campagne a été réalisée (manque de budget ?) par un DC junior qui imagine que les consommateurs sont cons ou tellement décalés qu’ils vont adorer (« Tu vois, les vieux, ils sont cap’ de faire des trucs de ouf, parce que la marque elle les protège, tu vois. Ils sont kap tu vois ?« )
Ces explications ne sont sûrement pas les seules, mais ce sont les écueils classiques qui transforment la meilleure idée en campagne fade et sans saveur.
Madame, échangeriez-vous votre baril de lessive de merde contre deux barils de lessive de merde moins chère?
La campagne marchera parce qu’elle est créative… FAUX ! la campagne marchera parce que vous avez acheté de l’espace. Rappelez-vous cette époque ou les pubs se ressemblaient toutes, où l’impact d’une pub était déterminé par le nombre de diffusion à la tv, au cinéma, à la radio ou sur vos magazines.
Et bien nous sommes exactement là-dedans. Quand la campagne Zaoza de Virgin gagne des prix chez Stratégies, c’est parce qu’on l’a vue partout. Et pourquoi on l’a vue partout ? Non pas parce qu’elle a été virale, non, parce que Virgin a acheté de l’espace publicitaire à gogo. C’est pas magique ça ? Non. C’est juste le plus fort riche qui gagne sur ce coup là.
Seulement si votre marque a moins de budget com que vos concurrents, alors vous êtes cuit avec ce genre de stratégie. Vous n’émergerez pas dans ce paysage saturé de pub qu’est devenu le web. De plus, en utilisant les mêmes armes que vos concurrents, vous allez automatiquement vous faire associer à eux. Vu le budget dépensé pour zaoza, Virgin est maintenant clairement associé à Orange, SFR et Bouygues. Même combat : des boites qui font beaucoup de pub pour vous capturer).
Les règles de la bonne stratégie digitale
Pour un stratège digital, la règle ultime pour construire une belle stratégie c’est d’être différent des autres.
- Réfléchissez au concept créatif AVANT de fixer les moyens/supports.
- Faites bosser des aficionados du web. Des spécialistes qui savent que l’on va utiliser un support interactif et donc que le résultat DOIT être interactif. Bref, des spécialistes qui savent mettre en adéquation les objectifs du client avec les différents modes d’expression sur Internet.
- Prévenez votre client que tel support (une vidéo virale ou un blog ou même un réseau social) implique tel ou tel compromis de la part de la marque. En se montrant sur Internet, la marque ne s’en sortira pas indemne.
- Faites bosser de bons créatifs (l’âge et le nombre de lions d’or à Cannes ne sont pas un critère déterminant).
Pour un annonceur, la règle ultime, c’est de m’appeler…
Heu, je plaisante; la règle ultime c’est de discuter avec les professionnels et d’être prêt à faire des compromis sur sa marque et sa posture de marque. Je ne pense pas que les « campagnes artificielles » aient un grand avenir sur Internet.
Et la dernière question à vous poser, c’est : est-ce que j’achèterais ou non cette campagne en tant qu’internaute ? Vous pensez vraiment que vous achèteriez une assurance chez Europe après avoir vu Marie Charlotte jouer avec son marteau piqueur ?
je trouve que le pire dans cette campagne, c’est que s’il y a eu une forte notoriété du nom Zaoza grace a l’investissement média, personne n’a compris l’offre produit qui était derrière (en l’occurence même pas encore lancée à ce moment là.
Ca rappelle Le Rentring : belle opé très soutenue en affichage à paris, mais en termes de résultat business…. zero !!!
Damned, j’aurais confondu ?
Ah oui, c’est bien Vivendi Mobile Entertainment.
Comme quoi, le succès de la campagne n’aura pas profité à l’annonceur…
heu zaoza c’est vivendi :)
Waouh, Bravo Cyril pour cet excellent article qui m’a vraiment passionné. Je suis à 100% d’accord avec la moralité de l’histoire, soit l’achat d’espace, et même la plus créative et juste des idées n’aura d’efficacité qu’à la suite d’un achat d’espace conséquent.
L’idée est de mettre de la créativité dans cet achat, que les régies publicitaires deviennent des agences de créa car les contenus sont aujourd’hui exportables, et tout ou presque peut être placé sur les contenants où se trouvent les internautes. Le mini site ne sert plus à rien…