Encore beaucoup de vieux pubards continuent à dire que la communication institutionnelle est chiante. Ces reliques d’un autre âge considèrent encore qu’il existe d’un côté la com’ créative, sexy et rock n’roll et de l’autre la communication corporate poussiéreuse et fossilisée.
Ces vieux déchets se plantent. Cela fait maintenant quelques années que la réussite d’une campagne passe plus par la réflexion stratégique autour des objectifs, des cibles et des moyens que sur le nombre de Lions d’or gagnés à Cannes. Tant pis pour les nostalgiques de l’ère 99 Francs, tant mieux pour les clients.
Et afin d’illustrer mon propos, voilà l’histoire d’une campagne de communication qui plonge ses racines dans le meilleur des mondes institutionnels et publicitaires. Bon, ok, je ne dis pas ça parce que j’en suis l’un des instigateurs, mais bon, elle a très bien marchée (en plus d’avoir reçu une Mention Spéciale du Web au Festival Européen de la Communication Responsable 2007 – Mince, I did it again ! Ca y est je vais encore recevoir des flopées de commentaires dénonçant ma vanité intrinsèque…).
Attention, ceci est un long article …
Le brief
Le Syntec Informatique (la chambre syndicale professionnelle de plus de 650 sociétés informatiques) a découvert après une étude sociologique, que le secteur informatique était mal connu, mal perçu et mal aimé par les jeunes (pff, les jeunes encore eux!). Le Syntec a donc décidé de lancer en 2007 une campagne d’attractivité auprès des jeunes pour changer l’image de l’informatique et de l’informaticien (rappelez-vous « je suis ingénieur informaticien« ).
Les objectifs de cette campagne : pallier le déficit d’image sur la profession d’informaticien, expliquer les métiers du Syntec informatique, et faire se rencontrer les professionnels du secteur avec les jeunes. La cible visée : les jeunes (14 20 ans), mais aussi leurs influenceurs (enseignants, conseillers d’orientation, parents).
L’histoire
A mon avis, ce qui différencie une bonne campagne de communication d’un patch work préfabriqué, c’est l’histoire ou l’idée créative (voir les stratégies digitales pour les nuls).
Dans notre cas, il nous a paru intéressant de raconter l’histoire d’une agence du future spécialisée dans la résolution de grandes problématiques de cette époque et qui porte le nom de Changeurs de Monde. Cette agence est constituée de jeunes gens sympas, cools et amicaux (parité respectée : une demande importante du Syntec, car les jeunes filles boudent les métiers de l’informatique, à tort d’ailleurs d’après cet article de Wired).
Les différentes problématiques sont reliées aux « univers passionnels » des jeunes, c’est-à-dire à des professions altruistes (« je veux aider mon prochain »), mais aussi à des activités sécurisants pour les parents (« je veux être sûr de gagner de l’argent »). Le tout habillé par une création graphique moderne et très dynamique.
Maintenant racontons l’histoire
D’où vient l’internaute ?
L’internaute est amené sur le site par une campagne bannière sur des supports de puissance et affinitaires (MSN, studyrama, Clubic, Iquesta, skyblog) mais également sur des sites d’orientation professionnelle (e-orientation.com, meformer.org, orientation-metiers.fr…). Sans oublier les relais off-line et le déploiement d’outils hors média (affichettes, flyers, objets promotionnels, supports d’affichages mobiles sur les salons …).
L’expérience Changeurs de Monde
Le site internet est conçu comme un entonnoir du plus ludique au plus pédagogique– du jeu au métier, du métier à l’entreprise en permettant à l’internaute de « jouer à construire son avenir». Car le site Changeurs de Monde est avant tout un jeu. Une sorte de jeu de rôle dans lequel vous pouvez, en consultant les informations du site ou en jouant aux différentes missions, augmenter ses points pour gagner l’une des dotations « utiles » prévues (dont des stages en entreprises informatiques).
Les contenus les plus attractifs du site sont sans contextes les missions, chaque mission est basée sur le principe bien connu du PuzzleBubble (un « casual game » permettant de ratisser le plus large possible dans la cible). Les autres contenus du site, permettent de présenter les métiers, mais aussi de découvrir et rencontrer les « gourous », de véritables experts travaillant dans des entreprises du Syntec.
Le jeu devient ainsi le vecteur du changement de perception que le jeune peut avoir de l’informatique. Non, après un petit tour sur le site des Changeurs de Monde, vous ne verrez plus les informaticiens de la même façon.
Et déclinons là sur le long terme
Après une première campagne 2007 qui a bien fonctionné en terme de performances qualitatives (groupes qualis, et verbatims web) et quantitatives (nombre de visiteurs uniques, durée de connexion, etc.), le Syntec informatique nous a confié la suite de cette campagne.
Les nouveaux objectifs : tout en continuant le dialogue amorcé entre les jeunes et les professionnels, insister sur les projets informatiques actuels et futures.Afin d’offrir une expérience renouvelée aux jeunes, nous avons retravaillé le look & feel de la campagne et transformé le premier site qui se voulait événementiel en blog permanent dédié aux projets informatiques. Les missions PuzzleBubble ont été améliorées. On y trouve toujours des gourous (les experts), mais ils sont accompagnés cette fois par des gourous étudiants. Et on y trouve enfin les métiers de l’informatique qui vous permettent, quand vous les consultez, de vous rapporter des points. Ces points vous permettant à chaque session de jeu de gagner des lots.
Conclusion : une démarche publicitaire pour une opération institutionnelle
Le plus grand intérêt de cette opération (pour qui n’est ni un jeune, ni un parent de jeune, ni un conseiller d’orientation de jeunes de 14 à 20 ans), c’est certainement la démarche qui a aboutie à cette campagne.
Au lieu de suivre classiquement les règles de la communication institutionnelle (kit de com, affichage presse, com de salons, etc.), nous sommes allé beaucoup plus loin en inventant une histoire, avec un logo, une ambiance, des personnages. Nous avons donné les moyens à cette histoire de s’épanouir, de se raconter elle-même, jusqu’à ce qu’elle existe. Et puis nous sommes en train de la faire vivre, comme une Marque (avec un grand M).
Durera-t-elle cette marque ? Je ne le sais pas, mais elle existe ! Et tant qu’elle existera, elle va changer les stéréotypes ancrés dans la tête des jeunes qui vont vivre l’expérience des changeurs de Monde (et qui vont enfin arrêter de se moquer des concours de calculatrice, quoique…).
PS
pour repondre à lovny
1)
FAUX ! une fille sera la reine au milieu des geeks
enfin sauf si c’est une féministe catholique divorcée aigrie, vécu… mais meme dans ce cas là elle peut se permettre beaucoup plus de manquements qu’un homme
2)
qui diable a besoin d’une convention ?
on bouge, on se défonce, on apprend, on gagne du fric, on va voir ailleurs
3)
FAUX ! si tu es dans SSII dynamique tu feras plein de missions
et surtout rien t’empéche de monter tes propres projets pour monter en puissance…
à nous de nous bouger ;)
par contre effectivement un gros turnover mais c’est plutot positif, franchement comment peut on rester 10 ans dans la meme boite…
tu l’auras compris, je suis dans les nouvelles technos… ^^
honnétement je trouve campagne bof
il n’y a pas un seul informaticien qui se lance dedans pour « aider son prochain » (ils font de l’huma !)
par contre beaucoup par PASSION technologique et pour créer leurs mondes
je trouve aussi le site un peu infantile avec son graphisme ado, mais bon… (je précise que je suis un jeune cadre et pas un « vieux fossile »)
dommage de pas pouvoir « communiquer » sans tomber dans la caricature, vous auriez plus faire quelque chose de plus adulte et en phase avec high tech, qui est partout
internaute ne veut pas forcément dire mouton ou gamin ou lobotomisé…
enfin je suppose que vous n’aviez pas trop le choix ;)
Pour te répondre sur tes différents points (sans défendre le Syntec car je ne suis pas payé pour), je pourrais te dire que :
1/ certes les femmes sont peut-être mal acceptées dans le secteur informatique (quoique ça dépend des sociétés). Mais justement l’un des objectifs de cette campagne est de rendre cette activité plus paritaire. Si nous y arrivons, cela améliorera surement le travail des femmes.
2/ Là je dis rien (je croyais que c’était celle de la pub? ;).
3/ Le turn over est souvent néfaste pour les entreprises (et intéressant pour les jeunes qui peuvent voir leur salaire grimper assez rapidement). C’est un choix de gestion. Je pense que toutes les entreprises du Syntec (650) n’ont surement pas la même attitude.
Maintenant nous avons été interrogés sur une campagne d’attractivité pas sur un audit du fonctionnement du secteur. Si un audit permettrait de vérifier les erreurs d’aujourd’hui, notre campagne va permettre au Syntec de continuer à exister demain. L’arbitrage des priorités n’est pas si évident.
Je te rejoins sur la non distinction entre les genre de clients et je trouve la campagne sympatoche…Cependant ça reste vraiment une campagne de pub assez mensongère parce que :
1) Les femmes sont mal acceptée dans les sociétés IT ou alors servent de potiche
2) La convention Syntech est la pire en ce qui concerne les droits du travailleur
3) Le secteur de l’informatique est un de ceux ou il y a le plus de turn-over car les entreprises du domaine ne font pas rapidement progresser leurs jeunes développeurs/ingénieurs à des postes à responsabilité
Bref, avant de faire campagne (aussi sympa soit celle-ci) le synthec ferait mieux de s’interroger sur sa convention et les pratiques de ses membres !!
(Je précise que ces réflexions sont issus d’une expérience vécue par moi et d’autres et n’est pas faite de préjugés).
Belle reco en effet. Sincères félicitations