pr0n : le plus gros mensonge d’Internet

masturbateSi il y a bien une information qui a été reprise (et plus ou moins bien commentée) partout lors de sa sortie, c’est le résultat de l’étude Google Zeitgest 2008. Cet article nous listait les 10 requêtes les plus populaires sur Google en 2008. On y trouvait en France dans l’ordre : Youtube, jeux, Yahoo, Pages jaunes, Orange, Facebook, video, tv, météo, Ebay.

La plupart des blogs-suiveurs (dont certains journaux papiers que je ne citerai pas) ont alors repris cette information en « l’analysant » (c-a-d en la remâchant). Tout ça pour apprendre à leurs lecteurs béats que les internautes regardaient beaucoup de vidéos, aimaient bien jouer, rechercher des trucs sur la toile et fréquenter des réseaux sociaux. Oui, on avait bien besoin de Google pour dévoiler ces comportements incroyables…

Mais personne, quasiment aucun blog ou journaliste, n’a parlé du comportement essentiel de l’internaute moyen. D’un comportement qui a développé l’adoption du web bien avant le e-commerce ou la publicité. Vous ne voyez pas ? Allez, un effort. Quelle peut-être la motivation commune d’un geek boutonneux, un grabataire encore vert et un cadre moyen démotivé ?

Oui, vous avez raison, le SEXE (le saiks) !! Car oui, la pornographie est l’un des moteurs, si ce n’est le moteur, d’Internet. Et ceux qui ne vous en parle pas, essaient de vous vendre quelque chose…

Une petite étude du phénomène pr0n sur le web…

Google a toujours eu des problèmes de cul

Montrer qu’Internet grouille de sexe et de porno n’enrichit que ceux qui en diffusent mais est très dangereux pour son image de marque (ça peut vous faire prendre les puissantes ligues de vertu américaine sur le coin de la bourse… Pas de jeux de mots). Alors Google a mis en place une stratégie de communication très efficace.

1/ limiter les communications sur le sujet

Une question posée à Larry Page (Google Guys in Time Magazine Cover Story) en 2006 :

TIME: How much do people use Google to look for porn?
Larry Page – It’s a small, single-digit percentage.

C’est ça Larry, on va te croire… Lisez plutôt Google Porn Search On Cell Phones qui met en doute sérieusement les chiffres de la recherche pour ‘adultes’.

2/ ajouter un filtre automatique pour trier les requêtes

Le fameux mode « safe », qui permet de ne pas afficher des images à contenu « sensible ». Une protection qui vous coupe de la moitié du web. Une sorte de filtre à mauvais contenu… A mauvais contenu, mais aussi à bon contenu car Safe Search bloque des sites pédagogiques sur le sujet (lire L’éducation sexuelle, difficile avec Google Safe Search).

Une aberration délirante (c’est quoi le mauvais contenu ?) alors même qu’une requête toute simple peut vous amener des images porno (voir  Porn Continues to Invade Google Web Search Through Universal Search).

Seule la fonction « report images » peut à la rigueur fonctionner. Mais ma croyance dans les capacités des folksonomies s’arrête justement dés qu’on va parler de religion ou de sexe. L’internaute à ce moment là ne réagissant plus de manière rationnelle, mais émotionnelle (une photo jugée artistiques par une population peut être bannie par une autre).

3/ traficoter les stats ?!

Naan, je ne dirais jamais que Google trafique ses statistiques. Mais par contre, je dirais que ses responsables ne nous communiquent pas tous les éléments, voir qu’ils orientent leurs données, au point de fausser les jugements de journalistes trop pressés.

Par exemple, les résultats de Google Zeitgest sont exacts si on les vérifie avec Google Trends (mais comment les vérifier autrement ?). Avec cet outil, on valide bien  qu’en France, le score des mots-clés porn et sexe sont largement inférieurs au mot-clé météo. alors même que si on teste la même requête dans le monde on voit que porn et sex sont nettement plus recherchés que wheather.

Impossible de trouver ces requetes (sex et porn) sur le site de Zeitgest. Elles n’apparaitront jamais ! Zeitgest ne vous propose en effet que des stats « épurées », des progressions de requêtes, des tops 10 thématiques. Bref, impossible de savoir quels sont les pays de pornophiles qui ne font que rechercher du cul sur Internet. Il faut bien qu’ils existent ces pays, mais ce ne sont pas ceux qui sont affichés sur le rapport Zeitgest qui n’affiche que des résultats bien propres prêts à être remachés par de gentils suiveurs (voir Les mots-clés les plus tapés sur Google en 2008 sur 01net et Le dernier Google Zeitgeist France 2008 sur PPC’s, qui lui au moins cite ses sources).

Si en plus, on remarque certaines curiosités dans les stats (lire Le porn français serait né en Septembre 2007), on ne peut qu’avouer qu’il y a une sorte de vaste zone d’ombre sur le sujet du cul.

Et pendant ce temps là, Internet déborde de sexe…

Un Internet qui déborde de sexe

Il n’est pourtant pas évident du tout de trouver des stats cohérente sur la recherche et la consommation de sexe sur Internet. Voilà pourtant quelques pistes.

Une étude (2007) nous apprend que 20% des recherches Google sur téléphone portable sont sur des contenus adultes, alors que seulement 8,5 % des requetes sur un ordinateur de bureau le sont (Cellphones search for more sex than ever).

D’autres sources vont donner un chiffre de 25% de recherches pornographiques sur les moteurs tels que Google ou Yahoo. On apprend également que 12% des sites internet dans le monde sont pornographiques (voir Porn, vous avez dit Porn?).

Et si vous voulez vous immerger pleinement dans le sujet, voilà une vidéo réalisée en 2007 par GOOD Magazine, qui nous donne  des chiffres sur la fréquentation des sites adultes sur le web.

[youtube]http://www.youtube.com/watch?v=QOFTQpNhsWE[/youtube]

Les jeunes américains passent environ 87h par an à regarder du porno sur Internet d’après une étude disponible sur Teens spend average of 87 hours a year looking at porn online. Ce qui nous fait 1h et 40 minutes par semaine à naviguer sur des sites porno.  Plus que le surf sur des sites de diététique et de perte de poids (1h35). Ce qui est très paradoxal car tout le monde sait bien que l’on perd du poids en faisant l’amour.

Pour d’autres comportement sociaux et statistiques poussées, lisez Pornography Statistics, une étude très complète mais hélas datée de 2006, donc légèrement obsolète (2006). Ca nous permet néanmoins de nous faire une idée.

Le porno, un vecteur d’innovation

He oui, rappelez vous le succès colossal du Minitel français. Quels étaient les services qui fonctionnaient le mieux ? Les services roses. Et bien pour Internet, c’est un peu la même chose, vous pouvez d’ailleurs allez voir les 12 innovations Internet dues à l’industrie du sexe. Attention, innovation ne voulant pas dire forcément « invention bénéfique » (le bonheur des uns fait le malheur des autres).

  • Les systèmes de micro-paiement online
  • Le Spam
  • Le Streaming de contenu
  • Les Malwares
  • Les Chats en direct
  • Les Pop-Ups, Pop-Unders, Mousetrapping
  • Le haut débit
  • Le Browser Hijacking
  • L’optimisation de trafic (SEO)
  • Le Hijacking de nom de domaine
  • Les services mobile 3G
  • et d’autres…

Si vous recherchez des arguments (pour justifier à votre patron votre conso de sites de charme) plongez vous dans l’édifiant essai de Peter Johnson Pornography Drives Technology: Why Not to Censor the Internet qui vous donnera tous les arguments nécessaires à votre veille technologique.

A lire également EroticaBiz : How sex shaped the Internet, un livre de Lewis Perdue disponible gratuitement en ligne.

« Le sexe n’est sale que si on ne se lave pas » : Madonna

Alors arrêtons de faire comme si le sexe n’existait pas sur Internet. Des tonnes de blogs en parlent, voir le classement Wikio Elle des blogs Love & Sexe. On y trouve de tout : de la critique bourgeoise et complaisante à l’analyse documentée et originale (lisez la piquante Maia).

Et puisque vous avez lu cet article qui parle de porno sans en voir une goutte (j’allais pas dire un poil), voilà une petite vidéo (safe for work, je vous rassure) qui devrait vous plaire sans casser la respectabilité légendaire de ce site. Il s’agit effectivement d’un projet vidéo de James Gunn, PG Porn, pour ceux qui aiment les films de boule mais pas le sexe qui va avec. Allez, un épisode cadeau avec la troublante Aria Giovanni.

Author: Cyroul

Explorateur des internets et créateur de sites web depuis depuis 1995, enseignant, créateur de jeux, bidouilleur et illustrateur. J'écris principalement sur les transformations sociales et culturelles dues aux nouvelles technologies, et également sur la façon dont la science-fiction voit notre futur.

7 thoughts on “pr0n : le plus gros mensonge d’Internet

  1. @Gabriel Je savais que ça allait te plaire ;)

    Plus sérieusement, sur les statistiques de recherche « adultes » sur le web, on oscille entre 8,5 annoncé par Google et 25% annoncé par des études plus ou moins officielles.
    Une fois encore, les experts de statistiques dominent le monde du marketing et de la com…

  2. Waouw Cyroul, excellent article.
    Je me doutait bien que tu étais un grand spécialiste du sujet, tu y es allé bien en profondeur dans l’analyse sémantique, pour notre plus grand plaisir…
    Plus sérieusement, je me dis souvent qu’il existe quelque part chez Google, le nombre exact de recherches orientées cul, les 8,5% que tu as annoncé m’ont surpris, j’aurais dis plus ( en me basant sur mon propre comportement ;P )
    Justement, il est probable que ce type de comportement est beaucoup évolué, que de moins en moins de recherche vont dans ce sens, parce qu’Internet devient autre chose qu’un super minitel avec des images en couleur et des vidéos SM en HD…
    ++
    et Bravo Cyroul, c’est du grand art

    Dernier billet de Gabriel : Faismesdevoirs : Pourquoi je me suis trompé

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